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Mahmoud Abbas

Alors qu’ils menacent de contrecarrer le plan de paix proposé par Trump, les palestiniens découvrent qu’ils sont les seuls du monde arabe à s’y opposer.

Traduit de l’article de: Khaled Abu Toameh,  Institut Gatestone

L’Autorité palestinienne (AP) a fourni de nombreux efforts en vue de persuader les pays arabes de soutenir sa position quant à l’impasse rencontrée avec l’administration américaine.

La direction de l’Autorité Palestinienne à Ramallah craint que, sans le soutien des pays arabes, l’administration américaine n' »impose » le « traité du siècle » du Président Donald Trump – un plan de paix au Moyen-Orient dont le contenu exact n’a pas encore été annoncé.

Les pays arabes, cependant, semblent être préoccupés par d’autres questions. Pour l’instant, les palestiniens obtiennent beaucoup d’éloges de la part de leurs frères arabes, y compris des promesses de faire pression sur l’administration Trump pour qu’elle «modifie» son plan afin de le rendre moins «nuisible» aux exigences et aspirations palestiniennes.

Ce qui se passe en réalité, c’est que les dirigeants de l’AP sont terrifiés à l’idée que beaucoup de pays arabes ne soutiennent le plan Trump, abandonnant ainsi leurs frères palestiniens et les exposant à la pression internationale pour accepter «l’accord du siècle». Une inquiétude qui ne semble pas être injustifiée.

Les responsables palestiniens ont déjà exprimé leur crainte que l’Arabie Saoudite, l’Egypte, la Jordanie et certains pays du Golfe soient en collusion avec l’administration Trump pour « imposer » le plan de paix, dont les détails doivent encore être rendus publics.

Ces pays arabes, soulignent les palestiniens, ont adopté une approche plus pragmatique et conciliante envers le réputé plan de paix et ne manifestent plus d’opposition forte, malgré les affirmations palestiniennes selon lesquelles les points principaux de « l’accord du siècle » appuient les positions du gouvernement israélien.

Contrairement aux palestiniens, les pays arabes ne souhaitent évidemment pas voir leurs relations avec l’administration américaine se détériorer. Leurs commentaires visent davantage à préserver de bonnes relations avec Washington que de soutenir les politiques du gouvernement israélien.

«La gifle du siècle»

Les palestiniens semblent être les seuls parmi le monde arabe à s’opposer systématiquement à ce plan que personne n’a encore vu.

Il ne se passe guère de jour sans que les palestiniens ne prononcent d’avertissements à l’encontre du plan de «liquidation» ou encore de la  «gifle du siècle» de Trump, comme certains l’ont commencé à le souligner. Les palestiniens se disent également déterminés à faire échouer le plan, malgré les conséquences que cela impliquerait.

« Les palestiniens ne se soucient pas de la date à laquelle le plan de Trump sera annoncé, puisqu’ils le rejettent« , a déclaré Nabil Sha’ath, ancien ministre des Affaires Etrangères de l’Autorité Palestinienne, conseiller principal du Président Mahmoud Abbas.

« Ce qui a déjà été divulgué sur le plan est suffisant pour que nous le rejetions. Nous n’accepterons pas un plan américain qui permettrait aux États-Unis de rétablir leur exclusivité sur le processus de paix. Si Washington veut contribuer au processus de paix, il doit le faire dans le cadre d’un forum multilatéral international.  »

Un autre haut collaborateur d’Abbas, Azzam al-Ahmed, a déclaré que « l’accord du siècle » de Trump ne passerait pas, dans la mesure où il ne prévoit pas à la création d’un Etat palestinien. Les Etats-Unis, a-t-il ajouté, ne sont plus qualifiés pour jouer le rôle de seul sponsor d’un processus de paix entre les palestiniens et Israël.

Le Secrétaire Général de l’OLP, Saeb Erekat, a également réitéré l’opposition palestinienne à « l’accord du siècle » de Trump. Accusant l’administration américaine de chercher à « liquider » la cause palestinienne et d’imposer ses préceptes aux palestiniens, Erekat s’est plaint à travers un « rapport politique », soumis aux membres de la faction dirigeante du Fatah à Ramallah la semaine dernière, de fait que les « lignes audacieuses » du plan Trump n’offraient rien d’autre aux palestiniens que « l’autonomie éternelle » et un état « démilitarisé ».

Une réponse arabe décevante à la campagne palestinienne

Au cours des dernières semaines, la direction de l’AP a fait campagne pour rassembler le soutien arabe quant à son opposition au plan Trump. Jusqu’à présent, cependant, l’effort palestinien n’a été que partiellement payant, voire pas du tout.

Lors d’une récente réunion à Bruxelles des ministres arabes des Affaires Etrangères avec leurs homologues européens, les palestiniens ont exigé que les pays arabes soutiennent leur position vis-à-vis du plan Trump. Les palestiniens réclament également un plus grand rôle de l’UE dans le processus de paix avec Israël afin que les Etats-Unis n’aient plus d’exclusivité sur le rétablissement de la paix.

Cependant, la réponse arabe à la campagne palestinienne a été décevante pour les palestiniens.

Les ministres arabes ont rejeté la demande palestinienne visant à diminuer le rôle des États-Unis dans le processus de paix. « Nous ne voulons pas exclure le rôle américain, qui reste majeur« , auraient affirmé les ministres arabes aux palestiniens.

Les pays arabes ont également refusé de soutenir la rhétorique anti-américaine des palestiniens. A en juger par le ton des dirigeants de l’Arabie saoudite, de l’Egypte, de la Jordanie et du Maroc, ils semblent adopter une approche douce vis-à-vis de l’administration américaine et de son plan de paix qui reste à être annoncé. Contrairement aux palestiniens, les pays arabes ne considèrent pas le plan comme une « conspiration visant à liquider la cause palestinienne et les droits nationaux« .

De plus, on dit à Ramallah que certains pays arabes ont fait pression sur les dirigeants de l’AP pour qu’ils acceptent le plan Trump.

« Plusieurs pays arabes pro-américains exercent toujours des pressions sur les dirigeants palestiniens pour qu’ils ne rejettent pas le plan américain« , a déclaré l’analyste politique Rasem Obeidat. « Ils demandent même à la direction palestinienne de traiter le plan d’une manière positive. » Il a appelé les palestiniens à cesser de compter sur les arabes et à unir leurs rangs et renforcer leur front interne.

Les Palestiniens espéraient que la réponse des pays arabes et musulmans à la décision de Trump du 6 décembre de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël serait beaucoup plus sévère. Le minimum que les palestiniens attendaient était que ces pays répondent en expulsant les ambassadeurs américains ou en fermant les ambassades américaines dans les capitales arabes et musulmanes. Ceci, bien sûr, ne s’est pas produit, au grand dam des palestiniens, qui se sentent, sur ce point encore, abandonnés par leurs frères arabes et musulmans.

La question palestinienne n’est plus au sommet de la liste des arabes

Les pays arabes semblent se lasser des palestiniens. Tout au plus, ils sont prêts à offrir aux palestiniens des déclarations publiques de soutien et des promesses de les aider à faire valoir leurs droits. Chacun de ces pays a ses propres problèmes et la question palestinienne n’est plus au sommet de la liste des priorités des arabes.

L’Egypte, par exemple, est préoccupée par sa guerre contre les terroristes djihadistes au Sinaï et la prochaine élection présidentielle, prévue pour fin mars. Les Egyptiens gardent des souvenirs amers d’ingérence dans les affaires internes des palestiniens. Au cours des trois derniers mois, les Égyptiens ont tenté, sans succès jusqu’à présent, de persuader le Hamas et la faction du Fatah d’Abbas de procéder à l’accord de « réconciliation » que les deux parties ont signé au Caire en novembre 2017.

La semaine dernière, une délégation de la sécurité égyptienne a eu des discussions intensives avec les dirigeants du Hamas dans la bande de Gaza dans le but de résoudre la crise, mais en vain. Une délégation du Hamas qui s’est rendue au Caire le mois dernier pour discuter des moyens de mettre en œuvre l’accord de « réconciliation » patente est rentrée les mains vides dans la bande de Gaza, après avoir passé trois semaines en Egypte.

Les saoudiens, pour leur part, sont également occupés avec leurs problèmes internes. Le prince héritier Mohammed bin Salman, souverain de facto de l’Arabie saoudite, est préoccupé par son projet visant à introduire des réformes majeures dans le royaume et de collecter des milliards de dollars auprès des princes corrompus et des hauts fonctionnaires. De toute façon, la direction de l’Autorité palestinienne ne semble pas avoir beaucoup confiance dans le jeune prince héritier et le soupçonne également de collusion avec l’administration Trump pour « imposer » l ‘ »accord » aux palestiniens.

De même, la Jordanie tente de résoudre ses propres problèmes, qui semblent énormes. La récente décision du gouvernement jordanien de supprimer les subventions sur le pain a déclenché une vague de manifestations dans tout le royaume.

Le Qatar et les Emirats arabes unis (EAU), quant à eux, travaillent séparément à la promotion de leurs propres programmes dans le paysage politique palestinien.

Les Qataris soutiennent le régime du Hamas dans la bande de Gaza, tandis que les Emirats Arabes Unis tentent de promouvoir leur mandataire palestinien, le chef du Fatah déchu, Mohammed Dahlan, en tant que prochain dirigeant palestinien. Les Emirats Arabes Unis auraient demandé à Dahlan de former un nouveau parti qui se présenterait aux prochaines élections présidentielles et législatives palestiniennes, si et quand elles auront lieu.

Les palestiniens contraints de faire face à la désagréable vérité

La direction de l’AP n’est pas satisfaite de l’interférence du Qatar et des EAU dans les affaires internes des palestiniens. Elle n’est pas non plus satisfaite de la façon dont l’Egypte semble avoir soutenu Dahlan, un ennemi juré d’Abbas. L’Autorité Palestinienne considère que l’ingérence arabe dans les affaires palestiniennes est nuisible et contre-productive. Elle n’est pas encore parvenue à retrouver l’époque où chaque pays arabe avait approuvé sa propre faction palestinienne.

Les palestiniens sont de nouveau contraints de faire face à la désagréable vérité: leurs frères arabes sont plus intéressés par leur propre survie que par la question palestinienne.

Cette apathie arabe envers les Palestiniens est le résultat d’une croyance de longue date dans le monde arabe que les palestiniens sont un peuple ingrat qui n’hésite pas à mordre la main qui les nourrit. Le soutien palestinien à l’invasion du Koweït par Saddam Hussein en 1990 – un pays qui fournissait chaque année des millions de dollars aux palestiniens – a marqué un tournant dans les relations entre les pays arabes et les palestiniens. Depuis lors, les palestiniens dépendent presque entièrement des financements américains et européens.

Lorsque Trump annoncera finalement son plan de paix au Moyen-Orient, les palestiniens découvriront qu’ils sont seuls à menacer de le contrecarrer. Les palestiniens ont de bonnes raisons de croire que les pays arabes sont sur le point de les laisser face à eux-mêmes. Et, après un demi-siècle de leadership raté et corrompu, les dispositifs palestiniens laissent beaucoup à désirer.

Khaled Abu Toameh, journaliste primé, est basé à Jérusalem.

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